- ÉQUATEUR (RÉPUBLIQUE DE L’)
- ÉQUATEUR (RÉPUBLIQUE DE L’)Situé en bordure du Pacifique, limité au nord par la Colombie, au sud par le Pérou, l’Équateur est la plus petite république d’Amérique du Sud après l’Uruguay. Ce pays doit son nom à l’équateur qui le traverse, non loin de Quito, sa capitale.Le pays et les hommesUne géographie déterminée par la chaîne andineLa république de l’Équateur s’étend sur 800 km le long de la côte du Pacifique et couvre 260 670 km2. Deux chaînes andines traversent du nord au sud le pays, qui se trouve ainsi divisé en trois zones nettement différenciées:– La plaine côtière , où vit 32 p. 100 de la population, s’élargit jusqu’à 150 km. Son climat est tropical au nord et très sec au sud.– La sierra , ou région andine, est formée par deux massifs entre lesquels s’étend une dépression située à 2 800 m environ. Là se trouve Quito. 61 p. 100 de la population vit dans cette région au climat tempéré. Les sommets des deux cordillères sont jalonnés par les cônes de cinquante et un volcans dont plusieurs sont encore en activité, notamment le Cotopaxi (5 966 m), le Pichincha (4 777 m), qui domine Quito, et surtout le Chimborazo (6 310 m).La plaine amazonienne , au climat chaud et humide, couverte de forêts tropicales, s’étend au-delà des Andes et abrite 6,11 p. 100 de la population.L’archipel des îles Galápagos (7 844 km2), situé à 500 milles à l’ouest des côtes, fait également partie du territoire équatorien.La ville principale de l’Équateur n’est pas la capitale mais Guayaquil, située à 450 km de Quito. C’est le seul port de l’Équateur et le centre principal du commerce extérieur et des banques.Le problème indienDe 1942 à 1992 la population de l’Équateur est passée de 2,5 à 11 millions d’habitants; 10 p. 100 de la population est blanche. Les Indiens purs vivent pour la majorité en marge des courants économiques majeurs. Le problème le plus grave et le plus difficile est celui de l’intégration de cette masse indienne dans la communauté nationale. On ne pourra y parvenir qu’en accroissant l’effort éducatif, déjà remarquable, et en élevant le niveau de vie des paysans et des ouvriers agricoles. Mais cela suppose une industrialisation accélérée et une réforme agraire qui se heurtent à l’hostilité résolue des grands propriétaires terriens.Les activités économiquesPrépondérance de l’agricultureL’économie de l’Équateur est essentiellement fondée sur l’agriculture; cette dernière fait encore vivre 40 p. 100 de la population, mais conserve une structure archaïque qui nuit profondément au développement économique du pays. 240 propriétaires possèdent 1 600 000 hectares, soit plus de terres que 350 000 petits paysans. Par ailleurs, 8 p. 100 seulement des 30 millions d’hectares cultivables recencés sont effectivement mis en valeur.Dans la région andine, les cultures sont surtout vivrières: orge, pomme de terre, maïs, haricots. Dans la région côtière, le riz, le cacao, le café, les bananes et d’autres fruits tropicaux sont cultivés pour l’exportation.L’Équateur a été le principal exportateur mondial de cacao vers 1920. Une maladie cryptogamique apparue en 1923 et la chute des cours sur le marché international ont fait passer la part du cacao dans les exportations nationales de 68,5 p. 100 en 1920 à 12 p. 100 en 1941. Actuellement, 129 500 hectares sont plantés en cacaoyers.La plus grande partie de la récolte de bananes est exportée vers les États-Unis, le Chili et le Pérou. Un certain nombre de mesures ont été prises pour éviter que les sociétés étrangères n’accaparent le commerce des bananes, dont l’Équateur est le premier exportateur mondial avec 2 100 000 t en 1967.La pêche compte également parmi les ressources importantes du secteur primaire. Les eaux équatoriennes, traversées au sud par le courant froid de Humboldt, sont très poissonneuses, et la question du droit de pêche est à l’origine d’un conflit permanent avec les États-Unis qui refusent de reconnaître la limite de 200 milles fixée par l’Équateur pour ses eaux territoriales. Plusieurs bateaux de pêche américains ont été ainsi arraisonnés par les autorités équatoriennes pour avoir violé la limite des 200 milles.Une industrie peu développéeLe pétrole, dont la production s’est accrue régulièrement depuis 1940, est la seule source d’énergie de l’Équateur. L’activité industrielle est relativement modeste en raison de l’absence de matières premières essentielles, du manque de capitaux et de l’exiguïté du marché extérieur. C’est du reste la raison pour laquelle, tout en manifestant certaines hésitations et en cherchant à obtenir certains avantages pour les pays les moins développés, l’Équateur a finalement décidé de rester au sein du groupe andin et de signer, en mai 1969, l’accord de Cartagena prévoyant l’intégration économique progressive des pays faisant partie de ce groupe (Colombie, Chili, Bolivie, Pérou, Équateur) par la création d’un marché commun sous-régional.L’industrie textile couvre 60 p. 100 des besoins nationaux, mais les matières premières, laine et coton, sont importées. 62 entreprises traitent des produits chimiques et une partie de la production pharmaceutique, excédentaire, peut être exportée. Les autres industries importantes intéressent le secteur alimentaire et la production de ciment.Parmi les produits manufacturés, il faut signaler une spécialité: les chapeaux dits «de Panamá», fabriqués à partir d’une fibre extraite des feuilles d’une variété de palmiers, Carludovica palmata . Des milliers de paysans s’adonnent à la fabrication de cet article exporté dans toute l’Amérique latine.Une histoire tourmentéeUne partie de l’ancien Empire incaLe territoire de l’actuelle république de l’Équateur faisait partie de l’Empire inca jusqu’à sa conquête par Pizarro en 1532. L’Équateur proclama son indépendance en 1809, à la suite d’un mouvement révolutionnaire, mais ne la recouvra réellement et totalement qu’en mai 1822, après que le général Sucre eut vaincu les Espagnols. D’abord intégrée dans la Fédération de Grande Colombie fondée par Bolívar, l’ancienne «présidence» de Quito, suivant l’exemple du Venezuela, fit sécession et se proclama «république libre et indépendante» le 13 mai 1830.Alternance des «conservateurs» et des «libéraux»En août de la même année, une assemblée constituante porta un conservateur, le général Flores, artisan de l’indépendance, à la présidence de la République. Il fut renversé en 1835 par Vicente Rocafuerte, libéral, mais fut réélu en 1839. Il fut à nouveau déposé en 1845 à l’initiative de Vicente Rocafuerte, qui fit élire Vicente Roca, un autre libéral. Ce dernier termina son mandat en 1849. Élu en 1850, Diego Novoa, accusé de «conservatisme», fut renversé en 1852. Plusieurs généraux se succédèrent ensuite au pouvoir jusqu’en 1861, date à laquelle une convention nationale porta à la présidence le chef des conservateurs catholiques, Gabriel García Moreno. Bien qu’il ait fait proclamer une constitution établissant le suffrage universel (la septième depuis l’indépendance), Gabriel García Moreno fut un dictateur tyrannique et cruel. Il plaça le pays sous l’autorité de la Société de Jésus et confia la totalité de l’enseignement à l’Église. Il fut assassiné en 1875 et son cadavre fut taillé en pièces par la foule.De 1875 à 1895, les gouvernements s’efforcèrent de mettre fin à l’âpre lutte entre les conservateurs et les libéraux. Ceux-ci furent portés au pouvoir par la révolution de 1895 et le conservèrent jusqu’en 1912. Puis, pendant dix-huit ans, caudillos et coups d’État ne cessent de se succéder. En 1930 éclata à Quito une révolution qui fit 200 morts; elle était due en partie aux graves difficultés économiques résultant de la crise mondiale de 1929 et de la mévente de cacao. Une période troublée s’ensuivit jusqu’en 1934 où l’ingénieur Francisco Páez prit le pouvoir et gouverna en dictateur. En 1940, le Dr Arroyo del Río succéda au président Narvaez, décédé en 1939.Des remous politiquesUne révolution porta au pouvoir, en 1944, José María Velasco Ibarra, dont la personnalité domina la scène politique vingt-cinq ans durant. Représentatif des grandes familles créoles équatoriennes et volontiers autoritaire, il avait été élu une première fois à la tête de l’État en 1933 et déposé en 1935 après s’être proclamé dictateur. Il fut à nouveau chassé du pouvoir en 1948 à la suite d’une révolte par les socialistes et les libéraux. Mais il fut une nouvelle fois déposé par l’armée en novembre 1961. Sa chute, due au mécontentement populaire provoqué par la dévaluation, fut précipitée par le violent conflit qui l’opposait à son vice-président libéral, Carlos Julio Arosemena. Après une semaine de confusion totale au sein du gouvernement et de l’armée, Arosemena fut désigné par le Congrès comme président de la République.Cependant, le 11 juillet 1963, le président Arosemena fut à son tour renversé par l’armée qui l’accusait de «favoriser le communisme».La junte fut renversée le 31 mars 1966, sans effusion de sang, et le Congrès élut en novembre 1966 un président provisoire, le Dr Arosemena Gómez, leader de la Coalition institutionnelle démocratique (C.I.D.), et une assemblée constituante chargée de rédiger la seizième Constitution depuis l’indépendance.Conservateurs, libéraux et socialistes (peu nombreux) préparèrent les élections du 2 juin 1968 dans une atmosphère de violence. Bien qu’élu avec une marge faible et sérieusement contestée, José María Velasco Ibarra – qui avait pris pour thème de sa campagne: «Velasco hier, aujourd’hui et demain» – fut porté pour la cinquième fois de sa carrière, à l’âge de soixante-quinze ans, à la présidence de la République équatorienne.Le 15 février 1972, renversé pour la cinquième fois par un coup d’État, le président Ibarra cède la place au triumvirat militaire du général Guillermo Rodríguez Lara, à qui succède le 11 janvier 1976 un Conseil suprême dirigé par le contre-amiral Alfredo Poveda.Fort de la découverte de gisements d’hydrocarbures en 1973, l’Équateur se hisse au second rang des producteurs de pétrole d’Amérique du Sud. Cette manne favorise aussi, sous la houlette de l’armée, la modernisation économique et politique, trait marquant des années 1970. Après le Mexique et le Venezuela, l’Équateur reprend à son compte le slogan «Semer le pétrole», autrement dit, utiliser les ressources procurées par les barils exportés pour financer le développement. De fait, le secteur des industries de substitution aux importations s’étoffe, la réforme agraire (loi d’octobre 1973) et la réalisation d’infrastructures rurales relancent l’agriculture (taux moyen de croissance de 4,4 p. 100 entre 1970 et 1977).Une nouvelle Constitution, adoptée le 15 janvier 1978 par 43 p. 100 des 1,8 million d’électeurs, reconnaît pour la première fois le droit de vote aux illettrés (23,4 p. 100 de la population) et dote le pays d’un exécutif bicéphale: président non rééligible, Congrès des députés exerçant les fonctions législatives et de contrôle de l’activité gouvernementale.Les oscillations des années 1980Au second tour du scrutin présidentiel, le 29 avril 1979, Jaime Roldos Aguilera, avocat de trente-neuf ans, recueille plus de 60 p. 100 des suffrages en compagnie de son colistier, Osvaldo Hurtado Larrea, âgé de quarante ans. Après sept années de pouvoir militaire, ce succès marque l’avènement d’une nouvelle génération politique qui incarne les aspirations réformistes des classes moyennes urbaines en plein essor. Symboliquement, le président prononce un passage de son discours d’investiture en quechua, la langue dominante de la forte minorité indienne, et lance une campagne d’alphabétisation. Jaime Roldos inaugure aussi une politique étrangère indépendante: soutien aux revendications panaméennes sur le canal, établissement de relations diplomatiques avec Cuba, rupture avec les «putschistes de la cocaïne» boliviens... Il annonce enfin: «Mon gouvernement ne plaira pas à l’oligarchie», mais n’a guère le temps d’en faire la démonstration. Son mandat est tragiquement interrompu le 24 mai 1981, lorsque son avion s’écrase, accidentellement selon la version officielle, sur une montagne du sud du pays, près de Loja.Le vice-président Osvaldo Hurtado, leader de la Démocratie chrétienne, assure une succession plus difficile que prévu. Il ne méconnaît pas les problèmes sociaux, puisqu’il a supervisé le plan quinquennal de développement, mais doit affronter un retournement de conjoncture. Le repli, à partir de 1981, puis la chute, en 1983, des cours de pétrole provoquent un tassement des ressources nationales, le déficit de la balance des paiements et un endettement croissant (à la fin de 1982, le service de la dette absorbe près de 40 p. 100 du montant des exportations). La mise en œuvre d’un programme d’austérité – dévaluation du sucre, la monnaie nationale, hausse du prix du lait, des céréales, des carburants... – accroît le malaise social. Le pays est paralysé à maintes reprises par des séries de grèves, à l’initiative notamment du Front unitaire des travailleurs. Et, dans l’ambiance démocratique qui prévaut, les surenchères d’une quinzaine de partis équivalent à une montée des critiques.C’est dans ce climat crispé qu’est élu (avec 51,7 p. 100 des voix), le 6 mai 1984, le candidat du Parti social-chrétien, León Febres Cordero, porte-parole des industriels et des commerçants costeños (de la côte pacifique). Adepte d’une présidence musclée, le «Lion de Guayaquil» doit guerroyer durant les trois quarts de son mandat avec un Parlement hostile. Lors des élections législatives du 1er juin 1986, ses partisans n’obtiennent que dix-neuf des cinquante-neuf sièges de députés provinciaux. Pour tourner l’obstacle, l’autoritaire président recourt fréquemment aux décrets-lois.Deux événements ont secoué le régime de León Febres Cordero: la mutinerie avortée de l’ancien chef d’état-major des armées, le général d’aviation Frank Vargas (mars 1986), et le violent séisme (mars 1987) qui affecte l’Oriente amazonien et le nord de la Sierra (plus de 3 000 morts). La rébellion militaire a mis en lumière le mécontentement d’une partie de l’armée et donné prise aux accusations de corruption de nombre d’officiers supérieurs (pots-de-vin encaissés à l’occasion de la signature de contrats d’armement). Le tremblement de terre du 5 mars 1987, qui brisa aussi l’oléoduc transandin reliant l’Amazonie au Pacifique et interrompit pendant près de six mois les exportations pétrolières, souligna les fragilités économiques (forte dépendance à l’égard de l’or noir).La philosophie néo-libérale, inspiratrice de la politique économique, se traduit par l’ouverture des frontières, le désengagement de l’État et le soutien au secteur agroalimentaire. Les cultures de rente traditionnelles (bananes et, dans une moindre mesure, café et cacao) se maintiennent, cependant que la diversification des activités et la conquête de marchés extérieurs progressent (fleurs, asperges, produits de la pêche...). Dès 1987, l’Équateur devient le premier exportateur mondial de crevettes.Un coût social élevé constitue la sévère contrepartie de l’entreprise. La baisse du pouvoir d’achat, la répression des protestations populaires, le chômage (15 p. 100 de la population active à la fin de 1987), et le sous-emploi manifeste forment les principales ombres au tableau. Sur le plan international, le gouvernement de Febres Cordero resserre les liens avec Washington. D’aucuns parlent d’alignement total.Le réveil indienLe 8 mai 1988, le social-démocrate Rodrigo Borja Ceballos (Gauche démocratique) recueille 52,8 p. 100 des voix. Il barre ainsi la route de la magistrature suprême à l’inquiétant populiste Abdala Bucaram, celui-là même qui proclame son admiration pour Hitler au milieu d’un flot d’outrances verbales.Les velléités transformatrices du régime Borja – affirmation du rôle de l’État dans le secteur pétrolier notamment – souffrent de la convalescence de l’économie, qui restreint les marges de manœuvre. Le pétrole ne constitue plus une garantie de prospérité, bien qu’il représente encore 40 p. 100 des recettes d’exportation. La machine économique, léthargique au début du mandat, autorise bientôt une croissance modérée (hausse du P.I.B. de 2,3 p. 100 en 1990 et de 2,9 p. 100 en 1991). Mais la persistance d’une inflation élevée (aux alentours de 50 p. 100) oblige à des dévaluations successives du sucre, la monnaie nationale.Le soulèvement pacifique des populations indiennes marginalisées paralyse le pays en juin 1990 et plonge l’Équateur blanc et métis dans la consternation. Des citoyens de seconde zone revendiquent à voix haute la reconnaissance de leur culture et proclament leurs droits ancestraux sur des terres souvent convoitées par les compagnies pétrolières. Ce spectaculaire réveil indien est aussi le fruit d’un patient travail d’organisation. Depuis novembre 1986, les Indiens de la dizaine d’ethnies présentes sur le territoire (Saraguros et Otavaleño de la Sierra, Shuar, Waorani, Secoya des plaines amazoniennes...) ont rassemblé leurs efforts au sein de la Confédération des nationalités indigènes de l’Équateur (Conaie). Les avocats de Rodrigo Borja soulignent les efforts accomplis: mesures en faveur de l’éducation bilingue (espagnol-quechua), concession de près de 3 millions d’hectares aux communautés indigènes en quatre ans... Il n’empêche, la caste dirigeante manifeste au mieux de la condescendance, et souvent du mépris, lorsque elle évoque le sort des Indios , avec une connotation péjorative.Le gouvernement Borja fut également confronté à la résurgence du vieux conflit frontalier avec le Pérou, ainsi qu’à l’implantation dans le pays des trafiquants de drogue. Depuis l’annexion par le Pérou, en 1941, d’une bonne part des provinces amazoniennes équatoriennes (entérinée par le protocole de Rio de 1942), les incidents se succèdent sur la frontière contestée. On a de nouveau frôlé le déclenchement des hostilités en 1991. La visite d’Alberto Fujimori à Quito (janv. 1992), la première d’un chef d’État péruvien depuis cinquante et un ans, a fait taire les armes. Le principe d’une médiation papale a été accepté par les deux voisins.Hier pays de transit du commerce de drogue et lieu de blanchiment des «cocadollars», l’Équateur devient une nouvelle terre d’accueil pour l’ensemble de la filière. Des champs de coca, mais aussi de pavot, ont été découverts dans les provinces méridionales et dans l’Oriente. Les milieux dirigeants, civils et militaires, sauront-ils résister à cette emprise croissante des trafics ?À l’occasion du scrutin présidentiel du 5 juillet 1992, le balancier politique s’est reporté à droite. L’ex-maire de Quito, Sixto Duran Ballen, soixante-dix ans, a devancé nettement (57 p. 100 des suffrages) un autre conservateur, Jaime Nebot, tandis que la gauche était laminée.On peut se féliciter du respect de l’alternance, gage d’un bon fonctionnement du modèle démocratique. Mais tout se passe comme si les leaders des divers partis politiques, appelés à tour de rôle à la tête de l’État, suscitaient finalement plus de désillusion que d’adhésion populaire. Les autres pays andins peuvent paraître plus mal lotis (sanglante guérilla du Sentier lumineux au Pérou, attentats meurtriers du cartel de Medellín en Colombie).Reste que les Équatoriens s’inquiètent d’abord de la baisse du pouvoir d’achat (le P.I.B.. moyen par habitant est tombé à 980 dollars en 1992) et attendent une redistribution plus égalitaire des richesses nationales. Le salaire minimum est parmi les plus bas de toute l’Amérique latine. La malnutrition est loin d’être éradiquée de zones rurales oubliées, moyenâgeuses, ou des vastes bidonvilles de la périphérie de Guayaquil qui «abritent» cinq cent mille personnes. La propagation de l’épidémie de choléra en 1991 et en 1992 (55 000 contaminés, plus de 750 morts officiellement recensés) a révélé les criantes inégalités en matière de santé: près des deux tiers des services médicaux sont concentrés dans les trois principales villes (Guayaquil, Quito, Cuenca).Outre ces préoccupations, le gouvernement de Sixto Duran doit affronter quelques autres défis majeurs: moderniser l’appareil économique à l’heure de la relance du marché régional, le Pacte andin, qui associe, depuis 1969, la Bolivie, la Colombie, l’Équateur, le Pérou et le Venezuela; rénover le système politique qui hoquette au rythme des incessantes mises en cause de ministres par les parlementaires, au point d’en oublier les programmes de réformes; réaliser enfin, cent soixante-deux ans après la proclamation de l’indépendance, l’intégration nationale, en cessant d’ignorer près de 5 millions d’Indiens. Au-delà de la gestion des affaires courantes, de la conduite des privatisations à la renégociation d’une dette extérieure qui s’élève à 13 milliards de dollars, les nouveaux dirigeants équatoriens se risqueront-ils à ouvrir ces chantiers aussi indispensables que parsemés d’embûches?
Encyclopédie Universelle. 2012.